[Rencontre] Anaïs Bouton, journaliste et animatrice chez Paris Première

ANAÏS BOUTON

 

C’est après une longue journée de cours que les étudiants du Master 2 DMC ont pu accueillir le 24 octobre Anaïs Bouton, journaliste et animatrice à Paris Première. Cette aventurière de la télévision française nous a partagé avec nous son parcours étonnant, les métiers qu’elle a faits, les rebondissements de sa carrière, ses questionnements politiques, son rapport aux réseaux sociaux et à l’information à l’ère du numérique triomphant, ainsi que les questions que posent son actuelle émission avec les polémistes Zemmour et Naulleau.

Ce jeudi soir, quand Anaïs Bouton arrive devant les étudiants du master, Alexandre Michelin se rappelle l’étudiante qu’elle avait été il y a plus de vingt ans quand elle postulait à la même formation. C’est l’occasion pour elle d’évoquer son parcours, et surtout son envie d’être journaliste qui est survenue très tôt. En effet, un des éléments déclencheur pour elle est l’élection présidentielle de François Mitterand, alors qu’elle n’avait qu’une dizaine d’années. Quand sa mère l’emmène fêter la victoire du nouveau président avec des amis, journalistes au Nouvel Obs, et que le lendemain, ses grands-parents conservateurs sont inquiets à cause du même évènement, elle se pose des questions sur la politique et voit naître en elle une vocation de journaliste.

Après une prépa littéraire, une maîtrise d’histoire et un master d’anglais, elle se présente donc au DESS Droit de la communication (ancêtre du master DMC) dans la volonté d’être réalisatrice de « documentaires lents », ce qui est encore aujourd’hui une notion obscure. Car ce n’est pas la direction que prendra la carrière de la jeune diplômée. Elle se met à travailler pour la télévision, où fait l’expérience à de tous les métiers de plateau, de journaliste pigiste, scénariste, et même animatrice sur France 2 dans « rince ta baignoire », sans appétence particulière pour ce dernier métier. Elle est curieuse de tout, elle tente tout. Elle grimpe ensuite les échelons et devient rédactrice en chef puis directrice éditoriale pour la chaîne de télévision Paris Première, sous la direction de Jacques Expert.

Elle a vu l’évolution de la chaîne Paris Première, la création d’émissions atypiques comme Paris Dernière. Nous avons pu parler de la manière dont cette chaîne a su se positionner dans le spectre de la télévision payante et se créer son identité caractéristique, comme le ferait aujourd’hui une Start up. Le fonctionnement de la chaîne a ensuite changé avec son intégration dans le groupe M6, et elle est aujourd’hui secouée par tous les problèmes que rencontre l’économie des chaînes thématiques, faisant face entre autre à des coupes budgétaires.

C’est en 2016, qu’elle doit, par un concours de circonstance, remplacer Valérie Brochard comme animatrice de l’émission Zemmour et Naulleau dont elle s’occupait en tant que Directrice des Programmes. Cette nouvelle expérience de présentatrice a été convaincante pour les dirigeants du Groupe, et Anaïs Bouton s’est retrouvée, presque malgré elle, au poste d’animatrice d’émission à un âge où les femmes exerçant ce métier ont tendance à être mises de côté.

Ce rebondissement de carrière étonnant a été l’occasion pour les étudiants du master d’évoquer les questionnements relatifs à la place des femmes dans les métiers de la télévision française. Anaïs Bouton a pu nous partager la manière dont elle a vu évoluer la condition féminine dans ce métier, les progrès qui existent, mais le chemin est encore long pour parvenir à l’égalité salariale, notamment…

Cette dernière émission, et le caractère polémique d’Eric Zemmour et Eric Naulleau ont aussi permis de nombreuses questions sur la présence de telles personnalités à la télévision française, et la manière dont semblent s’opposer la liberté d’expression et la condamnation de certains propos jugés intolérants. Cela a été l’occasion de parler de l’amplification et de la déformation médiatique qui existe autour d’eux, d’autant que l’intervention de madame Bouton a eu lieu le lendemain des propos de Zemmour sur le général Bugeaud lors de son débat chez CNews. Nous avons pu ainsi discuter de la place des réseaux sociaux dans l’information et la désinformation. Très exposée, Anaïs Bouton a choisi la prudence pour ses propres apparitions et ignore les attaques qu’elle subit elle-même. Elle prend avec recul la politisation de l’information et du journalisme sur ces même réseaux, notamment dans les formats courts impactants format courts tels que Brut et Konbini.

Ne jamais cesser d’être curieuse, c’est l’essentiel de la vie d’Anaïs Bouton, ce qui lui a permis d’aller si loin et d’être toujours aussi passionnée par ce qu’elle fait.

 

Par Paul De Seze